La rame qui a provoqué l'accident de tramway ayant fait 68 blessés samedi à Strasbourg n'avait pas de système de sécurité l'empêchant de repartir en arrière, a-t-on appris lundi, mais l'origine du dysfonctionnement reste encore inconnue.
"La rame qui est descendue n'était pas équipée, c'est une rame qui date des années 2000, et ce système n'existait pas à l'époque", a déclaré, sur Ici Alsace, le directeur général de la Compagnie des transports strasbourgeois (CTS), Emmanuel Auneau.
Toutefois, "elle est tout à fait conforme et homologuée pour circuler sur le réseau", a-t-il dit.
Les rames plus récentes fournies par le constructeur Alstom sont équipées de ce dispositif, a-t-il expliqué.
Le tramway, arrêté sur une pente ascendante à la sortie de la gare de Strasbourg du fait d'un embouteillage provoqué par une manifestation, "devait repartir et faire une sorte de démarrage en côte, ce qu'il n'a pas réussi à faire", a détaillé le directeur.
La rame est alors repartie en arrière et a violemment percuté celle qui la suivait, arrêtée à quai à la station souterraine de la gare de Strasbourg.
- Conductrice très choquée -
Mais les enquêteurs n'ont pas encore établi pourquoi la rame est repartie en arrière, et pourquoi la conductrice n'a pas pu l'arrêter.
Il n'y a pas eu de problème d'aiguillage, a affirmé Emmanuel Auneau.
"Ni les freins de secours, ni rien n'a fonctionné, donc on a beaucoup de mal à comprendre ce qui s'est passé", a de son côté déclaré à l'AFP le président de la CTS, Patrick Maciejewski.
La conductrice de la rame repartie en arrière, indemne physiquement mais très choquée, n'a pas encore pu livrer de détails sur les circonstances de l'accident à sa hiérarchie ni aux enquêteurs, a-t-il ajouté.
Le conducteur de la rame percutée a lui pu quitter l'hôpital lundi matin, tandis que la CTS a mis en place une cellule psychologique.
Deux enquêtes sont en cours: l'une, judiciaire, pour blessures involontaires, vise à établir d'éventuelles responsabilités pénales; l'autre, technique, vise à comprendre comment l'accident s'est produit.
Dans cette seconde enquête, les experts du Bureau d'enquête sur les accidents de transport terrestre (BEATT) de l'Etat "regardent toutes les traces qu'il peut y avoir sur les rails, sur les installations, pour essayer de comprendre exactement ce qui s'est produit", a expliqué Emmanuel Auneau.
"Et puis dans un deuxième temps, ils vont analyser toutes les données techniques qui ont été enregistrées par le tramway -on appelle ça une boîte noire- pour savoir si les freins ont bien fonctionné, si le conducteur a appuyé sur quel bouton à quel moment, comment s'est comportée la rame."
Les vidéos enregistrées par les caméras de vidéosurveillance ont également été consignées par les enquêteurs, a précisé Patrick Maciejewski.
- Circulation perturbée plusieurs jours -
Seuls les enquêteurs ont pour l'heure accès à la station où a eu lieu l'accident, jetant le flou sur la date à laquelle la circulation des tramways pourra reprendre dans le tunnel.
Mais elle devrait rester perturbée au moins "jusqu'à la fin de la semaine", a déclaré Emmanuel Auneau.
"Il faut que les experts, les autorités, nous autorisent à rentrer dans le tunnel et à extraire les rames, et puis ensuite, il faudra qu'on contrôle l'ensemble du tunnel pour savoir si tout est en sécurité pour pouvoir reprendre le trafic."
Des techniciens doivent exposer mardi matin à la direction et aux représentants du personnel ce qu'ils savent lors d'un comité social et économique.
Strasbourg fait partie des premières grandes villes françaises à avoir remis en service un réseau de tramways, en 1994, et avait déjà connu un accident, exactement au même endroit, fin octobre 1998. Un tramway en avait déjà percuté un autre dans le tunnel sous la gare, un accident dû à une vitesse excessive d'une des deux rames qui avait fait 17 blessés.
C.Jaggi--BD