Pas de suppression de postes enseignants pour les socialistes, pas de nouvel impôt pour la droite et le centre. Toujours à la merci d'une censure, le Premier ministre François Bayrou a confirmé lundi plusieurs concessions faites aux partis en les appelant à la "responsabilité" pour trouver un compromis sur le budget.
"J'ai confiance dans le sentiment de responsabilité de tous", a affirmé le chef du gouvernement sur la chaîne LCI.
Cet entretien intervient alors que les débats ont repris ce lundi en commission à l'Assemblée sur les comptes de la Sécurité sociale et avant une réunion cruciale, jeudi, de sept sénateurs et sept députés en commission mixte paritaire (CMP) pour rechercher un compromis sur le budget 2025 de l'Etat.
François Bayrou espère de nouveau convaincre le PS de ne pas voter une censure. Il a confirmé à cet égard l'abandon, réclamé par les socialistes, de la suppression de 4.000 postes d'enseignants, une décision "définitive".
Il a également écarté l'hypothèse de 7 heures de travail non rémunéré par an pour financer la Sécurité sociale, un autre irritant pour le PS mais aussi pour certains macronistes, car "le travail doit être payé".
Mais les socialistes "ne sont pas les seuls" à avoir des demandes, a-t-il ajouté en citant la droite et le camp présidentiel. A cet égard, s'il a confirmé une contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus, il a aussi assuré que les ménages ne paieraient "aucun impôt nouveau" en 2025.
Sur l'immigration, François Bayrou s'est dit favorable à une restriction du droit du sol dans le département de Mayotte mais pas en métropole.
Pour lui, ses ministres, le très droitier Bruno Retailleau (Intérieur) qui veut durcir les conditions de régularisation des étrangers en France, et le rocardien Eric Lombard (Economie) pour qui le pays "a besoin d'une immigration de travail", ont tous "les deux" raison.
- Dérapage à la Sécu -
Si "on n'a pas de budget, alors aucune des décisions nouvelles qui ont été annoncées ne peut être remplie", a-t-il de nouveau prévenu.
Il a promis aussi que l'organisation de l'Etat sera "repensée en profondeur" et que l'Etat allait maigrir "nécessairement".
Concernant le texte sur la Sécurité sociale (PLFSS), dont une première mouture avait entraîné la chute du gouvernement Barnier début décembre, les discussions ont repris à partir de la version adoptée par le Sénat fin novembre.
Mais les termes de l'équation ont changé, avec un déficit 2025 de la Sécu désormais anticipé à au moins 23 milliards d'euros, contre 16 milliards évoqués à l'automne.
Un dérapage qui s'explique notamment par l'abandon forcé des mesures d'économie sur les retraites, et par le coût de certaines concessions accordées par le Premier ministre aux socialistes sur le budget des hôpitaux ou sur le remboursement des consultations médicales et des médicaments.
Après son examen en commission, le texte doit revenir dans l'hémicycle à partir du 3 février.
- Budget de "compromis" -
En attendant, le gouvernement est confronté à la réunion décisive de la commission mixte paritaire (CMP), jeudi, pour rechercher un compromis sur l'autre texte majeur, celui du budget 2025 de l'Etat.
Cette CMP, où le socle commun soutenant le gouvernement est majoritaire, pourrait être l'une des dernières occasions d'intégrer des concessions susceptibles de résister à la censure.
L'exécutif en a bien conscience: la version du texte adoptée la semaine dernière par le Sénat doit être adoucie pour devenir un "budget de compromis", a assuré dimanche la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin.
La version issue de la CMP sera ensuite soumise à l'Assemblée, la semaine du 3 février, avec vraisemblablement l'usage du 49-3. Qui devrait donc déclencher une nouvelle motion de censure, déposée par les Insoumis.
D'où les appels du pied de l'exécutif en direction des rangs socialistes, qui ont renoncé mi-janvier à voter une précédente censure, mais sans s'engager pour la suite. "Le compromis n'empêchera pas, évidemment, le PS d'être dans l'opposition", a souligné Mme Montchalin.
Une perspective vivement rejetée par le coordinateur de LFI, Manuel Bompard: si le PS ne vote pas cette censure, a-t-il mis en garde, il changera d'alliance et entrera dans "un soutien sans participation" au gouvernement.
F.Prabhu--BD