Les forces kurdes progressent mercredi au sein d'une prison à Hassaké, en Syrie, où des combattants du groupe Etat islamique (EI) sont retranchés depuis six jours, les autorités locales appelant à l'aide de la communauté internationale pour empêcher un retour en force des jihadistes.
Plus d'une centaine de jihadistes au sein et en dehors de la prison ont participé à un assaut coordonné contre la prison de Ghwayran --supervisée par l'administration semi-autonome kurde-- qui a débuté le 20 janvier à Hassaké, dans le nord-est de la Syrie.
Dominées par les Kurdes, les Forces démocratiques syriennes (FDS), avec l'appui de la coalition internationale dirigée par Washington, s'emploient depuis à reprendre le contrôle total de la zone.
Elles "continuent mercredi le ratissage dans les dortoirs de la prison" et de ses environs, selon l'OSDH, au vaste réseau de sources en Syrie.
Des combats ont également lieu par intermittence la nuit aux alentours de la prison, a précisé cette ONG pour qui il s'agit de la "plus grande et violente" attaque de l'EI depuis l'annonce de sa défaite en mars 2019.
Au total, les affrontements depuis le 20 janvier ont fait 181 morts, dont 124 jihadistes, 50 soldats kurdes et sept civils, selon le dernier bilan établi par l'OSDH.
Au moins "mille terroristes ont été forcés de se rendre" depuis le début de l'offensive, ont déclaré mercredi dans un communiqué les FDS, ajoutant qu'elles tentaient toujours de reprendre l'intégralité de la prison.
Elles ont appelé les membres de l'EI à se rendre "en toute sécurité", tout en rejetant le terme de "pourparlers", a indiqué Farhad Shami, porte-parole des FDS.
La prison abrite au moins 3.500 membres présumés de l'EI, y compris des Occidentaux, d'après l'OSDH.
Selon l'ONU et des organisations de défense des droits humains, des centaines de mineurs sont détenus dans cette ancienne école reconvertie en centre de détention.
- Négociations -
Sur Twitter, Letta Tayler, chercheuse au sein de Human Rights Watch, a cité trois détenus occidentaux --dont un mineur-- décrivant leurs difficiles conditions de vie depuis l'assaut.
"Ils disent qu'ils ont peur d'être abattus s'ils essaient de sortir. Ils mendient nourriture, eau et médicaments" et demandent "aux Nations unies ou à toute instance internationale de leur négocier une sortie en sécurité", écrit-elle.
Un dirigeant syrien de l'EI négocie avec les Kurdes pour la fin des affrontements en échange de soins médicaux pour les jihadistes blessés, a affirmé à l'AFP le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane.
Des combattants étrangers de l'EI s'opposeraient à cette stratégie, d'après lui.
L'OSDH affirme que les forces kurdes ont libéré 32 employés du centre pénitentiaire depuis lundi.
"Militairement, l'affaire est presque réglée", a assuré sous le couvert de l'anonymat un haut responsable kurde, avant de préciser que les forces kurdes avaient dû "reporter (leur attaque de la prison) en raison de la présence de mineurs et pour éviter un maximum de pertes humaines."
Nicholas Heras, chercheur à l'Institut Newlines, ne voit pas d'autre issue qu'"une défaite totale des jihadistes en prison".
"Le scénario catastrophe" pour les FDS et la coalition dirigée par Washington "serait un affrontement de longue haleine qui ferait des centaines de morts, dont de nombreux enfants emprisonnés."
- Appel à l'aide -
Mercredi, l'administration semi-autonome kurde a renouvelé auprès de la communauté internationale son appel à l'aide, craignant que l'EI ne se renforce en recrutant de nouveaux combattants.
"C'est un problème international que nous ne pouvons régler seuls", a souligné auprès de l'AFP Abdel Karim Omar, haut responsable local.
Malgré les exhortations répétées des Kurdes, la plupart des pays occidentaux refusent de rapatrier leurs citoyens qui se trouvent dans les prisons et camps, se contentant de rapatriements au compte-goutte.
"Nous avons vaincu l'EI territorialement, sans éliminer l'idéologie terroriste", a estimé M. Omar.
Des experts voient dans cette attaque contre la prison une nouvelle étape vers la résurgence de l'EI, qui s'est repliée dans le désert syrien après avoir perdu son "califat".
"A moins que la communauté internationale ne fournisse une aide suffisante, y compris économique (...) un nouveau contrôle de l'EI sur cette zone n'est pas à exclure", a-t-il averti.
C.Jaggi--BD