Viols de Mazan: la victime demande la fermeture des cagnottes de soutien / Photo: Christophe SIMON - AFP
Gisèle Pelicot, dont le mari est jugé à Avignon pour l'avoir droguée afin de la faire violer par des inconnus, un procès très suivi, a demandé vendredi la fermeture de cagnottes de soutien et "la plus grande modération sur les réseaux sociaux".
"Madame Gisèle Pelicot et sa famille remercient toutes les personnes qui ont envoyé massivement du monde entier des témoignages de soutien depuis le début du procès", ont indiqué leurs avocats Stéphane Babonneau et Antoine Camus, dans un communiqué.
"Néanmoins, notre cliente souhaite impérativement préserver la dignité et la sérénité des débats qui se tiennent actuellement. (...) Elle en appelle donc aujourd'hui à la plus grande modération sur les réseaux sociaux, ne souhaite aucunement l'ouverture de cagnottes de soutien en ligne et demande la fermeture de celles déjà ouvertes", écrivent-ils.
Au moins une cagnotte en ligne a été lancée, par Nabilla Benattia, ex-star de téléréalité devenue influenceuse. Intitulée "Nouvelle vie pour Gisèle Pelicot", elle vise à "participer aux frais de justice (de la victime) et à l'aider à traverser cette terrible épreuve". Ouverte jeudi soir, elle était "en cours de vérification" par le site hébergeur vendredi à 11H00, après avoir approché les 40.000 euros.
Depuis son début lundi devant la cour criminelle d'Avignon, ce procès hors norme, avec 51 accusés - le mari et 50 autres hommes âgés de 26 à 74 ans - accusés d'avoir violé Mme Pelicot, de juillet 2011 à octobre 2020, après que celle-ci avait été droguée aux anxiolytiques par son mari, suscite un énorme intérêt.
Médias traditionnels en France et à l'étranger et réseaux sociaux se passionnent pour l'affaire, d'autant que la victime a souhaité que le procès ne se tienne pas à huis clos, afin d'attirer l'attention sur le phénomène de la soumission chimique et pour que "la honte change de camp".
Des listes avec le nom des accusés, accompagnées parfois de commentaires sibyllins tels que "si ça peut servir", circulent ainsi sur les réseaux, notamment sur X (ex-Twitter).
Des avocats de la défense se sont également plaints à l'audience d'être "assaillis" sur les réseaux sociaux.
Le président de la cour criminelle, composée uniquement de magistrats professionnels, Roger Arata, avait répondu jeudi en rappelant le "principe fondamental" de la présomption d'innocence. Mais il a souligné que son pouvoir de "police", prévu dans le code de procédure pénale, se limitait à ce qui se passe dans la salle d'audience.
"Nos clients perçoivent parfaitement que ce dossier est le drame de familles, des deux côtés de la barre car celles des accusés n'ont rien demandé non plus," a insisté auprès de l'AFP Me Camus, un des avocats de Mme Pelicot.
"Les avocats de la partie civile prennent la mesure de ce que peut représenter pour d'autres familles la portée de ces audiences", s'est félicité auprès de l'AFP Paul-Roger Gontard, avocat de deux accusés.
"Tout le monde a droit au respect", a-t-il insisté. "Aujourd'hui sur les réseaux sociaux, on affiche en des termes définitifs des noms, des professions, des situations maritales, des vies, des existences qui pourraient dans quelques mois être reconnues innocentes".
"Une justice sereine n'est pas une justice en 140 caractères sur Twitter (aujourd'hui X)", a-t-il poursuivi. "Une justice sereine, c'est une justice qui, au bout d'un temps d'audience et avec des débats construits et argumentés, permettra ou non de déclarer une culpabilité. Sans quoi ce n'est pas de la justice, c'est un peloton d'exécution judiciaire".
L.Apte--BD