Les investissements massifs de Google dans l'intelligence artificielle (IA) commencent à porter leurs fruits sur le cloud mais la périlleuse transformation du moteur de recherche ne débouche pas encore sur des revenus.
Au deuxième trimestre, Alphabet, la maison mère de Google, a réalisé un chiffre d'affaires de 84,74 milliards de dollars (+14%), dont elle a dégagé un bénéfice net de 23,6 milliards, en hausse de 28%, d'après un communiqué publié mardi.
Ces résultats meilleurs qu'escomptés sont portés notamment par la bonne performance de son activité de cloud (informatique à distance) qui commercialise de plus en plus de services d'IA générative, pour produire du texte, des images ou encore des lignes de code, sur simple requête en langage courant.
"Notre infrastructure d'IA et nos solutions d'IA générative pour nos clients ont déjà généré des milliards de dollars de revenus et sont utilisées par plus de 2 millions de développeurs", a souligné Sundar Pichai, le patron d'Alphabet, lors d'une conférence pour les analystes.
Pour la période d'avril à juin, Google Cloud a quasiment triplé son bénéfice opérationnel sur un an, à 1,17 milliard de dollars.
Numéro trois du cloud (derrière les deux géants du secteur, Amazon et Microsoft), Google a ainsi su séduire de nombreuses entreprises et start-up qui ont besoin de modèles d'IA générative pour gagner en productivité ou mettre au point de nouvelles applications.
- Colle à pizza -
La tâche s'avère plus compliquée pour les services au grand public.
Le lancement au printemps d'AI Overviews ("Aperçus IA") - Google boosté à l'IA générative - a été marqué par des réponses étranges, fausses ou absurdes à des questions d'utilisateurs.
La plateforme a ainsi proposé à un internaute de mélanger de la colle "non toxique" au fromage pour qu'il colle mieux à la pizza, sans doute inspirée par des commentaires sur des réseaux sociaux utilisés pour entraîner le modèle d'IA.
Google a rectifié le tir, et Sundar Pichai a assuré mardi que "tous les retours sont positifs".
Le déploiement progressif d'AI Overviews conduit à "plus de recherche en ligne" et "plus de satisfaction des utilisateurs", a-t-il ajouté, notamment "chez les jeunes de 18 à 24 ans".
En matière de monétisation, Philipp Schindler, vice-président du groupe, a déclaré que les internautes trouvaient les publicités affichées dans AI Overviews "utiles" et pense que la nouvelle formule va "ouvrir de nouvelles opportunités pour les annonceurs".
Au début, AI Overviews "a pris du plomb dans l'aile", a réagi Evelyn Mitchell-Wolf, analyste d'Emarketer, et les "difficultés vont continuer au second semestre".
"Mais comme Google est le moteur de recherche par défaut sur la plupart des smartphones et des principaux navigateurs web, il ne risque pas vraiment de subir une baisse de revenus proportionnelle à l'atteinte à sa réputation", a-t-elle nuancé.
De fait, les recettes publicitaires du moteur de recherche sont ressorties à 48,5 milliards de dollars (+14%) au deuxième trimestre.
- Cookies et puces -
Le chiffre d'affaires de YouTube, 8,66 milliards de dollars, a en revanche déçu alors que le service est en tête des plateformes de streaming en termes d'audience.
Google vient par ailleurs d'annoncer qu'il renonçait au projet de supprimer les très controversés cookies tiers, qui servent à pister les internautes pour les cibler avec des publicités personnalisées.
La société californienne peut ainsi "entamer le second semestre avec cette échéance en moins, libérant des ressources pour ses initiatives en matière d'IA", a commenté Evelyn Mitchell-Wolf.
Le géant des technologies vient en outre d'économiser quelques 23 milliards de dollars, alors que l'entreprise israélienne Wiz, spécialisée dans la sécurité du cloud, a renoncé à être rachetée, d'après la presse américaine.
Alphabet a investi plus de 13 milliards en "propriétés et équipements" au deuxième trimestre, soit 91% de plus qu'à la même période l'année dernière, un budget qui reflète ses besoins en nouveaux centres de données et puces ultra sophistiquées, nécessaires à l'IA générative.
Des investissements qui ont aussi un coût environnemental, les machines plus performantes consommant plus d'énergie.
En 2023, Google a vu ses émissions de gaz à effet de serre atteindre 14,3 millions de tonnes de CO2, soit une augmentation de 48% par rapport à 2019, son année de référence, d'après son rapport environnemental annuel.
"À mesure que nous intégrons l'IA dans nos produits, la réduction des émissions pourrait s'avérer difficile", a noté le groupe américain au début du mois.
P.Mueller--BD